Sans BDES, le délai de consultation sur les orientations stratégiques ne court pas ; il en est de même si une consultation ponctuelle, en cas de réorganisation d’un service, a été entreprise peu après.
« Attendu que dans l’exercice de ses attributions consultatives, le comité d’entreprise émet des avis et voeux, et dispose pour ce faire d’un délai d’examen suffisant fixé par accord ou, à défaut, par la loi. Lorsque la loi ou l’accord collectif prévoit la communication ou la mise à disposition de certains documents, le délai de consultation ne court qu’à compter de cette communication. Tel est le cas, dans le cadre de la consultation sur les orientations stratégiques de l’entreprise, de la base de données économiques et sociales [BDES] qui est le support de préparation de cette consultation ; (…) » (Cass. soc. 28-3-2018, n° 16-12.707)
Conséquences :
En l’espèce, le comité d’entreprise est informé et consulté entre octobre 2014 et mars 2015 au cours de 3 réunions, sur les orientations stratégiques, puis entre mars et juin 2015 sur un projet de réorganisation d’un service au cours d’autres réunions. Le 16 juin, il saisit le président du TGI statuant en la forme des référés pour lui demander :
- d’une part, de constater que le délai de consultation sur les orientations stratégiques n’avait pas couru faute pour l’employeur d’avoir mis à disposition les documents d’information nécessaires,
- d’autre part, d’ordonner la production de documents complémentaires dans le cadre de la consultation sur la réorganisation et de proroger d’un mois le délai de cette consultation .
L’arrêt de la cour d’appel, qui avait déclaré irrecevables les demandes du comité d’entreprise visant à écarter l’application du délai préfix [de un à quatre mois, selon qu’il y a intervention d’un expert, du CHSCT ou de l’ICCHSCT] au motif que la président du TGI avait été saisi plus de quatre mois après la communication des informations requises, est cassé car ce délai n’avait pas commencé à courir.
Du fait de la dépendance entre les deux cas de consultation (orientations stratégiques et réorganisation), l’arrêt de la cour d’appel a été également cassé sur le second moyen.
Conclusion : il est essentiel que les directions d’entreprise se préoccupent de mettre en place la BDES dans les conditions prévues par la loi ou les accords conclus ; à défaut, elles s’exposent à une contestation non seulement au titre du non-respect de leurs obligations relatives aux « consultations récurrentes » (orientations stratégiques, situation économique et financière, politique sociale de l’entreprise) mais également en cas de « consultation ponctuelle ».
Bien entendu, cette solution est transposable au comité social et économique (CSE) et à toutes les consultations récurrentes.
Article rédigé par Jean-Marc JAUFFRET, avocat au barreau de LYON jm.jauffret.avocat@free.fr